•  Sources d’information :

    1- Couiza une Ville un Canton – 1989 – (livre) –

    Editeur « Fondation Ville de Couiza » - Auteur : MARCEL André

    2- L’Aude de la Préhistoire à nos jours – Editions Bordessoules –

    Auteurs : Michel BARBAZA – Raymond COUDERC – Jacques CREMADEILLS –

    Michel GAYRAUD – Jean RIVES – Yves SOLIER –

    3- Rapport d’enquête sur la Chapellerie dans la Haute Vallée – Auteur : Jean Claude BOUVIER

     

    Les trois principales industries audoises au XIXe siècle sont : les forges, le textile et la chapellerie.

    En 1787, le département compte 15 forges dont une à Quillan. Couiza n’a pas de forge. En 1850, la plupart des forges ont disparu. En 1870, seule la forge de Quillan emploie encore 9 ouvriers. Le XVIIIe siècle est une période de grande prospérité pour l’industrie textile languedocienne en général, et audoise en particulier. Production de grande qualité, c’est la première activité industrielle du département.

    Elle occupe, entre 1850 et 1860, dans le seul diocèse de Carcassonne, 18000 ouvriers.

    En 1880, il n’y a plus que 1800 ouvriers ; en 1884, les manufactures de drap audoises n’existent plus.

    Les causes de cette disparition sont multiples : relâchement dans la qualité, la confiance que nos marques inspiraient dans le Levant fut ébranlée- les Anglais profitèrent habilement de cette faute- et enfin les difficultés à moderniser les moyens de production. Seul le Limouxin aura résisté plus longtemps. La draperie limouxine connaît au XIXe siècle trois phases très nettes.

    De 1812 à 1825, période de grande prospérité. Limoux exporte.

    De 1825 à 1850, période de stagnation. Les débouchés extérieurs se ferment ou passent à la concurrence. La qualité des produits baissent.

    De 1850 à 1860, période de décadence rapide.

    Les mécaniques pour filatures introduites dans l’Aude vers 1811 ne s’installeront à Couiza qu’en 1813/1814.

    En 1814, la seule filature de laine emploie 30 ouvriers. Elle a été créée par des fabricants de drap de Limoux « Germain JOLY – Père – et Martin PRATX » et maintiendra son activité jusqu’en 1837 environ.

    La fermeture interviendra en 1840 – les salles du mécanique sont devenues un dépôt de manganèse de Casimir CAPTIER.

     

    XVIIIe et XIXe siècles, Histoire de l’Industrie Chapelière en Haute Vallée.

     

    L’implantation de la chapellerie dans la Haute Vallée de l’Aude paraît dater de la fin du XVIIIe siècle et du tout début du XIXe.

    De ce que l’on peut lire et ce que l’on a pu entendre, des soldats de l’Armée Française, faits prisonniers pendant la guerre de sept ans (1756/1763 – règne de Louis XV) par les Prussiens, auraient pendant leur captivité appris le métier de chapelier. Ils l’ont exercé, à leur retour, dans le village de Bugarach jusqu’en 1820 où ils s’installèrent à Espéraza disposant de meilleurs atouts de développement. Ainsi, dès la fin du XVIIIe siècle et au tout début du XIXe, deux chefs de famille de Couiza exercent déjà la profession de chapelier ; ils ont noms : LABATUT et SIAU.

    Ensuite, vers l’An VI de la République, l’un de ces artisans accueillera un jeune garçon venu de Chalabre afin de l’initier à ce métier fort en vogue.

    Ce jeune garçon, Jean RUMEAU, est jusqu’à présent le premier chapelier de Couiza cité dans les actes.

    Avec lui, les premiers chapeliers de Couiza sont : Pierre LABATUT, Pierre SIAU, Michel JEAN, Paul et Jean Baptiste SIAU.

    En 1811, les deux établissements de Couiza occupent 3 ouvriers.

    Une longue période de stagnation va s’ouvrir et durer jusqu’en 1855.

    1856 voit la reprise s’installer et l’on assiste à un développement, mais début 1960 la chapellerie est au ralenti, les fabricants cherchent de nouveaux marchés – il y a reprise, et la chapellerie régionale emploie plus de 400 ouvriers.

    Un an plus tard, la concurrence des chapeaux de paille ou d’étoffe fait chuter les ventes et il n’y a plus que 200 ouvriers.

    En septembre 1875, les 12 chapelleries de Limoux, Couiza et Espéraza emploient dans leurs ateliers 840 ouvriers (500 hommes - 300femmes et 40 enfants).

    En 1878, nouvelle crise. Les 9 établissements disséminés à Chalabre, Couiza, Espéraza et Quillan n’occupent plus que 189 ouvriers. La crise s’acharne sur la région à tel point qu’au 1er trimestre au 1880 aucun établissement industriel n’est signalé à Couiza.

    En 1881, l’industrie chapelière ne se cantonne plus qu’à Limoux (7 hommes et 20 femmes) Quillan (25 hommes et 2 femmes), mais surtout à Espéraza où 6 usines occupent (200 hommes, 75 femmes et 25 filles mineures).

    A Couiza se crée la « Société Raynaud et Cie » pour la vente de chapeaux. Les dépendances du château abritent pour leur part l’usine la plus importante de Couiza. Elle a été créée il y a une quinzaine d’années par Monsieur GUINOT, mécanicien et fabricant qui occupe en 1891 un nombreux personnel.

    Elle expédie dans le monde entier des milliers de chapeaux, faits à la mode de Paris.

    Quelques années plus tard, il ne reste plus qu’une usine de chapeaux à Couiza qui occupe 200 ouvriers.

    En août 1898, après la morte saison les commandes devenant rares, à peine un quart des ouvriers ont repris le travail sur les 2000 que compte la Haute Vallée (1270 à Espéraza, 313 à Quillan et plus de 400 à Couiza. Le siècle se termine et, on l’aura remarqué, l’essor de l’industrie chapelière a connu bien des hauts et des bas mais a pu quand même se développer.

     

    Industries diverses

     

    Au début du XIXe siècle, le petit artisanat diversifié semble le moyen sûr de subsistance de Couiza.

    En 1811, la carrière de plâtre occupe 3 ouvriers. L’année suivante l’établissement de fours à plâtre emploie 2 ouvriers.

    Limoux au XVIIIe siècle connaît une vie industrielle intense avec des mégisseries, des tanneries, des forges et les débuts de la chapellerie.

    En 1866, les 60 artisans de Couiza « gagnent plus à faire leur métier qu’à gratter les rochers ».

    Les frères RAYNAUD (François et Etienne) fabriquent chacun 30 romaines par an à 30 francs pièce.

    En 1832, Bernard MAUGARD construit une tuilerie près de son moulin à plâtre sur la Salz et à 40 mètres de la route de Narbonne.

    En 1854, Mr BELS réinstalle une filature à Couiza ; on compte en 1961, à côté du Château, 2 filatures avec 20 ouvriers.

    En 1875, l’industrie du plâtre et de la chaux connaîtra un essor remarquable mais de courte durée.

    1881, une filature de laine réapparait avec 6 ouvriers.

    En 1891/92, 2 carrières à plâtre sont en exploitation ; elles appartiennent l’une à Urbain SIAU et Mme MERIC, l’autre à Jean CASTEL.

     

    Histoire de l’Industrie Chapelière en Haute Vallée

     

    Le XXe siècle verra l’apogée et la fin de l’Industrie Chapelière dans notre contrée.

    Les premières années du nouveau siècle verront la prolifération de sociétés chapelières plus ou moins importantes créées par des familles, des groupes d’amis, et d’anciens ouvriers.

    La Haute Vallée est, avec la chapellerie, la seule région du département à avoir résisté à la désindustrialisation : elle connaîtra même son âge d’or dans l’entre deux guerres à Couiza, l’évolution sera chaotique.

    En novembre 1900, se constitue la société « RAYNAUD-MARRE » manufacture de chapeaux à Couiza ; elle fermera en mars 1902.

    En novembre 1904, nouvelle création « FROMILHAGUE-MAZIERES » ; fermeture en août 1906.

    En 1908, nouvelle société établie au lieu-dit « le Mécanique » qui sera un an après la société « PEILLE-RAYNAUD-COLL ». elle est la seule fabrique de Couiza. La majeure partie des ouvriers est affiliée au Syndicat d’Espéraza.

    Mois d’août 1909 – les ouvriers d’Espéraza, en grève pour obtenir de meilleurs salaires, obtiennent satisfaction et reprennent le travail.

    Mais ceux de Couiza, ayant soumis les mêmes revendications, se heurtent à un refus catégorique ; ils se mettent en grève le 12 août, un accord interviendra le 23 août avec reprise du travail. Le patron va alors moderniser, installer des machines plus performantes qui vont supprimer des emplois. Un nouveau conflit se prépare.

    Le 17 décembre 1909 les 80 ouvriers adultes se mettent en grève mais, après bien des péripéties, l’usine fermera ses portes le 6 janvier 1910.

    Une autre grève beaucoup plus importante débutera le 3 janvier 1910 à Espéraza pour durer plus de 9 mois donnant ainsi la possibilité aux industriels de mécaniser à outrance leurs entreprises.

    Les 1000 ouvriers grévistes allaient connaître des moments difficiles. La reprise sera dure, la modernisation a supprimé des emplois malgré l’augmentation des commandes, mais la guerre viendra résorber l’excès de main-d’œuvre. Les commandes sont honorées. Les usines de la Haute Vallée, déjà fortes de 620 ouvriers, produisent 900 000 cloches et 950 000 chapeaux finis. L’après guerre (1920) verra le nombre d’ouvriers passer à 962 pour 8 000 000 de cloches et 1 500 000 chapeaux finis. En 1927, l’industrie du chapeau assure le travail à plus de 3000 ouvriers.

    Si la production de cloches reste inchangée par rapport à celle de 1920 (8 000 000), celle des chapeaux finis est passée à 3 000 000.

    Cette progression a absorbé toute la main d’œuvre locale et attire une foule d’ouvriers venus d’au-delà des Pyrénées.

    En mai 1914 naîtra une nouvelle société « Etablissement BAUDOT-VIVIES » qui s’installera au « Mécanique ». Elle deviendra, en 1919, la société « VILLA-VIVIES ».

    En 1920 sera créée la société CANAT de La Chapelle qui deviendra la société « CANAT de la CHAPELLE et Cie ».Le siège est à Couiza mais l’usine est à Montazels sur les bords de l’Aude à côté de la gare.

    Début 1928, une nouvelle société est en cours de constitution : c’est l’I.C.A. (Industrie Chapelière de l’Aude) née de la fusion des Ets Jean Peille à Espéraza et de la société Canat de La Chapelle à Montazels. Le principal actionnaire est Marius PEILLE fils de Jean PEILLE qui sera Président National de la Chambre Syndicale des Industries Chapelières et périra dans un accident de la route dans les années 1950.

    Courant 1929 sera créée l’ U.C.F. « Union Chapelière Française ». L’ U.C.F. regroupera trois usines : Carcassonne pour la fabrication de bérets, Couiza fera des cloches et Espéraza les chapeaux. 1929 verra aussi la création par Henri ROUX de Couiza, Paul ALA de Tarbes, Roger CHAFFORT de Toulouse et Pierre BOURREL de Bugarach d’une S.A.R.L. avec le sigle « Val d’Aude » et dont le siège sera à Couiza.

    Le grande crise financière de 1929 va stopper la progression et enclenchera la chute de l’industrie chapelière.

    Fin 1930 l’I.C.A. menace de mettre en chômage momentané les 900 ouvriers de ses usines de Couiza et Espéraza.

    Au 30 octobre 1930, sur les 18 établissements de la Haute Vallée, les effectifs ouvriers sont les suivants : Espéraza – Quillan : 3517 - Couiza : 650.

    De 1921 à 1931 l’Industrie Chapelière aura vécu son âge d’or. La seule ville d’Espéraza a pu produire 3 000 000 de chapeaux par an et l’I.C.A. compte 900 ouvriers. A Quillan, BOURREL aura employé 411 ouvriers en 1926 et, sous son égide, l’équipe de rugby a été Championne de France en 1929.

     

     

    Décadence et disparition

     

    En quelques mois, sous l’effet de la crise, l’effectif baisse sérieusement et compte seulement : Haute Vallée 1861 ouvriers - Couiza 245 ouvriers -

    Bientôt l’usine de la gare ferme tout comme de nombreuses usines de la Haute Vallée.

    Dans l’été 1932 les « Etablissements BOURREL Réunis » sont absorbés sous forme d’apport fusion par l’ I.C.A. A Couiza, seule l’usine du « Mécanique » continue à produire

    1938 Fondation de la Société Auxiliaire de l’Industrie de feutres de laine pour chapeaux et cloches.

    1942 Fusion de Supless et la Quillanaise pour créer la Manufacture Moderne de cloches et chapeaux.

    1949 Fondation de l’Union des producteurs français de cloches de laine.

    1950 Première faillite GERVAIS VILLA. Faillite des Ets GARROUSTE.

    1951 Faillite des Ets GABIGNAUD – Fermeture de l’usine de cloches de la Manufacture Moderne.

    Fermeture de l’usine de cloches des Ets RAYNAUD et de la Manufacture Aixoise.

    1952 Deuxième faillite de GERVAIS VILLA. Faillite BASSET

    1953 Fermeture des Ets CLAMOU.

    1954 Faillite de l’ U.C.F. – Fondation de la « Compagnie Française des Industries de la Chapellerie »

    1955 Fondation de la Société des feutres de France

    1959 Création de S.O.F.E.F.R.A. et de C.O.F.I.C.

    1962 Création de la S.O.F.I.C., société qui regroupe tous les fabricants de cloches et de chapeaux existant encore dans la Haute Vallée.

     

    Industries de remplacement

     

    Courant 1932, début de la chaussure avec le chausson de feutre mis au point par Mr CANAT à l’usine VILLA de Couiza.

    Très vite on passe à la fabrication de chaussures diverses et en 1935 l’usine VILLA emploie près de 250 ouvriers.

    Une grande usine verra le jour 10 ans après, à côté du Château. Après une période faste le 26 mars 1955 c’est la faillite de l’usine RYN’H anciennement VILLA.

    Entre temps, d’autres usines plus petites se sont créées qui absorberont une partie des chômeurs : SIAU, ROMERO, DAVID et SERRET, FERRIE, HERRERO, Paul RAYNUD, Paul FRAISSE. Celles-ci disparaîtront rapidement.

    Limoux aura vu se créer MYRYS et CHAUSSERIA qui ouvrira à Couiza en 1983 une unité. Après dépôt de bilan le 15 décembre 1988, elle fermera définitivement les ateliers le 24 janvier 1989, licenciant 9 ouvriers.

    Au début des années 1950 Quillan accueillera FORMICA qui, pendant de nombreuses années, assurera la prospérité de Quillan et ses environs.

    A Espéraza, en 1961, s’installe la Société GLACICA, fabricant de tôles ondulées en matière plastique translucide, dans l’usine de l’I.C.A. vidée d’une partie de la fabrication de chapeaux. Cette société quittera Espéraza pour aller s’installer en Indre et Loire en 1964.

    Elle sera remplacée par la Société Industrielle de Stratifiés (S.I.S.) fabricant de mousse de polyuréthane rigide (isolant thermique) pour isolation des toitures-terrasses et camions frigorifiques.

    A la fin des années 1970 la S.I.S. sera achetée par le Groupe Elf Aquitaine et prendra le nom d’ELFI. Ensuite deux sociétés prendront le relais jusqu’à la fermeture totale en 2008.

     

    Aujourd’hui – Année 2011

     

    La Haute Vallée est pratiquement désindustrialisée, seul l’artisanat et quelques petites entreprises offrent quelques emplois. Les maisons de retraite et les organismes d’aide à domicile emploient de la main-d’œuvre surtout féminine, évitant à la Haute Vallée une désertification trop importante.

    Elle est, comme beaucoup d’autres lieux, victime de la concentration des activités autour des grands centres industriels, et des délocalisations.


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