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    Le RUGBY des JEUNES

    à Couiza

     

    Implanté en Haute Vallée depuis le début du siècle, avec comme porte drapeau l’US Quillan, puis le CAO Espéraza et plus tard le CO Couiza, le rugby, sport de masse a toujours attiré la jeunesse de toute la région.

    C’était le sport populaire par excellence et, dans la première moitié de ce siècle secouée par les affres des deux guerres, on se retrouvait tous les dimanches au match en famille pour applaudir les joueurs qui s’affrontaient sur le stade. On jouait au rugby partout. Les terrains : la rue, un pré, la cour de récréation… le ballon : une pelote de chiffons ou, luxe suprême, une balle. Quant aux règles de jeu et à l’arbitrage, on les adaptait…. Le plus important était surtout le jeu fait d’improvisations, de passes, de feintes et de sains combats. C’était un plaisir partagé. Et tous rêvaient de porter un jour sur leurs épaules les maillots « bleu et rouge » de l’USQ, « bleu et blanc » du CAOE ou « vert et blanc » du COC pour défendre leur village et leur clocher. La vie économique industrielle de la Haute Vallée, florissante à cette époque-là, permettait tous les rêves et fixait les jeunes au pays.

    C’est au cours des années 50 que commença à se structurer le rugby chez les jeunes et la création de petits collèges ruraux n’y est pas étrangère, le rugby étant le sport roi dans les Ecoles Normales qui formaient instituteurs et professeurs. Mr Gosse, directeur du Collège à Quillan en fut le précurseur avec l’Association « les Izards » qui regroupait de nombreuses activités sportives et en particulier le Rugby.

    Les clubs, conscients de l’importance que représentait la jeunesse pour leur potentiel joueurs, essayèrent de se structurer pour mieux fonctionner. Des équipes de juniors et cadets se créent à Quillan et Espéraza, clubs qui évoluaient en fédération Nationale, et le COC engage une équipe de cadets à 8 sous la responsabilité de Lucien Faure. Parallèlement, au début des années 60 apparurent les premières Ecoles de Rugby. Sous l’impulsion d’André Camboulives à Quillan, Henri Riu à Espéraza et André Ribéra à Couiza en 1964, aidés par de nombreux bénévoles, anciens joueurs ou autres, les Ecoles de Rugby regroupaient tous les jeunes de 10 à 14 ans qui pratiquaient un rugby adapté à leur âge, rugby éducatif et formateur par excellence ou seul comptait le plaisir de participer, de jouer, de se retrouver entre jeunes de même âge sur le terrain avec un ballon ovale et un éducateur pour arbitrer et conseiller.

    Chaque club possédait sa propre Ecole de Rugby complète et participait à une petite compétition mise en place par la Délégation Départementale de l’Aude. Au collège, les jeunes jouaient au rugby à 8 ou à 15, dans le cadre de l’USEP ou de l’UFOLEP, tout en pratiquant d’autres disciplines sportives. Le rugby était alors le sport roi au niveau des jeunes.

    Mais peu à peu tout va basculer au début des années 70. La vie économique, si prospère jusque là, connaît une récession importante et de nombreuses usines sont en difficulté. L’emploi se fait de plus en plus rare obligeant les familles à partir vers d’autres cieux. Le football, fortement médiatisé, attire de plus en plus les jeunes qui délaissent le ballon ovale pour le ballon rond. Les évènements de mai 68 ont aussi contribué à changer la société. On parle de plus en plus de loisirs et de « sports loisirs » au sein de la famille. Certains sports comme le tennis, le ski, se sont peu à peu démocratisés et attirent la foule. De nombreuses disciplines sportives créent aussi leurs propres écoles et, tout naturellement, les jeunes se dispersent. Cependant, l’effort des clubs de rugby en faveur des jeunes continue à Quillan, au niveau école de rugby « cadets et juniors ». Couiza et Espéraza ont leur propre Ecole de Rugby mais au niveau « cadets et cadets/juniors B » une première ébauche d’entente toute morale se dessine dans les années 71, 72, 73 grâce à l’apport des jeunes des deux villages qui se retrouvent tous les jours au collège, encadrés par leurs professeurs éducateurs MM. Canut Francis et Ribéra André. Les résultats ne se font pas attendre :

    1971/72  et 72/73 : Champion du Languedoc Cadets/Juniors B.

    D’année en année, les effectifs se réduisent comme peau de chagrin. Chaque club peine pour alimenter le réservoir « jeune » et bien fonctionner. En 1974, lors d’une réunion à Espéraza, Mr. Maugard, Président et Mr Gosse, Secrétaire de l’US Quillan avaient tiré la sonnette d’alarme après une étude sur la démographie de la Haute Vallée en baisse sensible dans les dix années à venir. En 1975, un prémisse d’entente entre les trois clubs se dessine et une équipe « junior Crabos » entraînée par André Ribéra voit le jour, devient Championne du Languedoc dans cette catégorie et participe au Championnat de France où elle est battue en 8ème de Finale à Lavelanet par le TOAC (13 à 12).

    Mais il faudra encore attendre quelques années pour faire admettre au sein de la population et des clubs qu’une entente au niveau des jeunes est nécessaire à la survie du Rugby en Haute Vallée. Il fallait alimenter le creuset « jeune » pour que chaque club, dans leur catégorie, puisse aligner sur les terrains une équipe « senior ». Il n’est jamais facile ni aisé de changer un état d’esprit. Il a fallu passer outre les querelles de clocher et les rivalités de village, expliquer le pourquoi, se défendre pour qu’enfin naisse, après une année d’approche en 77/78, la première équipe de l’Entente de tous les cadets de Quillan, Espéraza et Couiza. Cette équipe, basée à Espéraza, composée de 28 cadets (8 de Quillan – 11 d’Espéraza – 9 de Couiza) et de 3 juniors 1ère année d’Espéraza autorisés à jouer avec les cadets, disputera le Championnat du Languedoc des séries régionales « Cadets B » encadrée par Francis Font et André Ribéra, bien secondés par les dirigeants des trois clubs et les parents.

    Une année de transition qui débouchera tout naturellement vers une entente officiellement engagée auprès du Comité du Languedoc sous l’appellation « Entente Haute Vallée » lors de la saison 79/80 en « Cadets B »

    Les obligations fédérales imposant à Quillan évoluant en 2ème division une équipe « Junior » et une équipe « Cadet », propres au club, tous les 25 cadets (13 de Quillan – 8 de Couiza – 4 d’Espéraza) sont administrativement licenciés à l’US Quillan mais, dans l’esprit, tous défendent les couleurs de la Haute Vallée. D’ailleurs, pour mieux symboliser cette alliance, ils évoluent sur les terrains en maillots à damiers « noir et blanc » coupant ainsi toute polémique auprès des supporters quant à l’appartenance entière à un club. Sur la lancée, l’équipe junior emboîtait le pas des cadets et venait grossir les rangs de l’Entente. Les résultats ne se font pas attendre. Les cadets seront sacrés Champions du Languedoc « Cadets B » dès la première (deux anciens joueurs de l’USQ) remportaient le Challenge des Provinces en 79/80 et étaient sacrés Champions de France Balandrade en 82/83. Ils remporteront pendant deux saisons consécutives 86/87 et 87/88 le titre de Champion du Languedoc.

    Quant aux cadets, drivés par André Ribéra aidé de Jean-Michel Cathala et Serge Laffont, ils connaîtront aussi leurs heures de gloire disputant en 1987 la finale régionale perdue contre Béziers en groupe « A » et le Championnat de France, toujours en groupe « A » pendant trois saisons 87/88, 88/89 et 89/90 contre les clubs prestigieux de Toulon, Narbonne, Stade Toulousain, La Voulte, Cahors….

    Parallèlement on s’organise aussi au niveau des Ecoles de Rugby. Si Quillan continue à fonctionner seul, Couiza et Espéraza, sous l’impulsion d’André Ribéra et Louis Sanmartin ainsi que de tous les éducateurs des deux clubs, avec l’aval des présidents et des municipalités concernées, regroupent leurs effectifs en 1981 pour former l’Entente Couiza/Espéraza (COES) aux couleurs « Vert Bleu et Blanc », chaque club n’ayant pas assez d’éléments pour figurer dans les différentes compétitions.

    Deux ans plus tard, devant les difficultés toujours grandissantes, au niveau des Minimes, dues à la dénatalité (13 joueurs au COES – 6 à l’USQ HV) les dirigeants sont amenés à réunir

    ces jeunes pour ne former qu’une seule et même équipe reconnue sous le sigle « Minimes de l’EHV ». Il ne restait plus qu’à regrouper les Benjamins et les Poussins.

    Ce fut chose faite en 1993 sous l’impulsion de MM. Maugard, Gosse, Aragou et Ribéra, aidés par les éducateurs et les dirigeants.

     

    C’est ainsi qu’est née en 1994 l’ARPA (Association du Rugby des Pyrénées Audoises) avec l’adhésion du Pays de Sault au système et l’accord tacite des Municipalités qui mettent en commun toutes les forces vives en présence, les jeunes, les éducateurs, les installations sportives propres à chaque village (terrains de rugby Couiza – Espéraza – Espezel – Quillan, gymnases, ainsi que les salles) et nous assurent aussi de leur soutien financier.

    Tournée vers l’intercommunalité, voire de « l’inter cantonalité », l’ ARPA a mis en place un réseau de ramassage sur les quatre cantons qui permet aux jeunes des villages d’assister aux différentes séances d’entraînement ainsi qu’aux compétitions propres à leur catégorie. Les éducateurs et entraîneurs, tous diplômés et bénévoles, s’efforcent d’inculquer aux jeunes les vertus du rugby tout en privilégiant avant tout, au travers des exercices spécifiques à la catégorie, la formation du joueur sans oublier pour autant les fondamentaux de notre sport. Le projet de jeu commun pour toutes les catégories a pour but de mettre en place des phases de jeu afin que le joueur passe d’une catégorie à une autre sans problème d’adaptation majeur, les éducateurs et entraîneurs parlant le même langage tant en ce qui concerne la technique collective qu’individuelle.

    Le sérieux et la bonne tenue de l’ARPA a d’ailleurs valu à celle-ci d’obtenir, en septembre 2006, la « Labellisation de la FFR » qui rejaillit sur l’ensemble de l’Entente.

    De nombreux joueurs de l’Entente Haute Vallée ont connu les honneurs de sélections régionales voire même nationales (équipe de France Junior pour Michel Cuguillère) prouvant ainsi que le niveau rugbystique en Haute Vallée était de qualité et pouvait rivaliser avec les grosses écuries qu’ils ont souvent inquiétées. Cela venait donner raison et récompenser tous les dirigeants, tous les clubs, qui avaient cru fortement à cette initiative et qui s’avérait être une réalité indispensable à la survie du Rugby dans notre région en alimentant depuis de nombreuses années les trois clubs supports : l’USQHV, le RC COES et l’USPS qui aident et soutiennent cette action. Et même si certains joueurs ont quitté la région pour tenter avec bonheur leur chance dans des clubs plus huppés (Eric Nicol à l’AS Montferrandaise – Michel Raynaud à Toulon – Eric Rodriguez à Agen – Christophe Rossel à Pia et à Limoux XIII….) beaucoup sont restés fidèles à la Haute Vallée.

     

    Ainsi, des débutants aux juniors, les jeunes pratiquant le rugby se retrouvent au fil des années dans un même club : l’Entente Haute Vallée. Ils sont animés d’un même état d’esprit et d’une même ambition : faire perdurer le rugby dans cette terre d’Oc excentrée et enclavée, secouée par la récession économique et industrielle mais qui veut vivre et montrer que sa jeunesse, loin de se résigner, est pleine de vitalité et porteuse d’espoir.

     

    L’entente au niveau des jeunes est parfaite. Et, dans un avenir plus ou moins lointain, il faudrait la poursuivre au niveau supérieur pour que vive le RUGBY….. mais ceci est une tout autre histoire……

    Couiza, juin 2012

    André Ribéra

    en hommage à tous les éducateurs bénévoles qui l’ont aidé et soutenu.

     

     

     


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